Le choix de la mairie de Marseille d’avoir recours à des contrats de partenariats privés pour faire sortir de terre 34 nouveaux établissements scolaires provoque la colère de l’opposition, de parents et de professionnels du bâtiment.
« Nous ne reculerons pas ! » Le maire Les Républicains de Marseille, Jean-Claude Gaudin, a réaffirmé jeudi 21 juin, lors de la traditionnelle conférence de presse annonçant les nouveautés de la rentrée scolaire, la volonté de sa majorité municipale d’aller au bout de son « Plan École d’Avenir ».
Pointée du doigt, il y a trois ans, pour l’état de délabrement de certaines de ses écoles, la Ville de Marseille a voté à l’automne un vaste plan de construction de 34 écoles. Il s’agit, notamment, de détruire et rebâtir les 28 modules à structures métalliques dits « écoles Pailleron » datant des années soixante encore présents à Marseille.
À la tribune, Jean-Claude Gaudin saluait alors « un plan Marshall sans aucun équivalent », mené pour un montant dépassant le milliard d’euros via un partenariat public privé (PPP).
Cette procédure permet à une collectivité de déléguer à un groupe privé la construction et la gestion d’équipements publics sur une durée pendant laquelle la collectivité paie un « loyer », avant de récupérer le site en fin de contrat. La ville versera aux promoteurs retenus 41 millions annuels durant 25 ans pour rembourser la réalisation des travaux.
« Une triple injustice »
Mais depuis le mois d’octobre, le choix de ce montage juridique et financier n’en finit plus de faire des vagues. L’opposition socialiste emmenée par Benoît Payan dénonce « une triple injustice ».
« D’abord, c’est injuste financièrement parce que le PPP va coûter à la collectivité 92 à 93 millions d’euros de plus qu’une maîtrise d’ouvrage publique (MOP), détaille l’élu, ensuite c’est inepte économiquement : le plus gros marché signé ces trente dernières années par la ville ira forcément à des multinationales et échappera au tissu économique local.
Enfin, en termes éducatifs c’est catastrophique. Pendant 25 ans, nous ne serons pas propriétaires de ces écoles. Les groupes retenus auront la possibilité de valoriser le foncier et de faire de la spéculation immobilière. »
Une double requête devant le tribunal administratif de Marseille
Même franche hostilité du syndicat national des entreprises du second œuvre (SNSO), de la Confédération de l’Artisanat et des Petites Entreprises du Bâtiment (CAPEB). Quant au syndicat des architectes des Bouches-du-Rhône, il voit là « un choix inique qui va à l’encontre de l’intérêt public ».
En décembre, le conseil national de l’ordre et le conseil régional de l’ordre de Provence Alpes Côte d’Azur, ont d’ailleurs déposé une requête conjointe devant le tribunal administratif de Marseille demandant l’annulation de la délibération.
La création d’un collectif contre les PPP
En parallèle, des parents d’élèves, des artisans et des enseignants se sont regroupés sous la bannière de « Marseille contre les PPP ».
Ce collectif travaille avec l’ordre des architectes Paca pour « proposer des alternatives qui permettraient aux professionnels du bâtiment d’obtenir les contrats locaux, aux enseignants de travailler dans de meilleures conditions, aux parents d’être rassurés par des locaux sains et bien sûr, et surtout, aux élèves de pouvoir étudier dans des conditions optimales », selon les mots de Pierre-Marie Ganozzi, secrétaire départemental de la FSU.
Jean-Claude Gaudin ne recule pas
Reçu en mairie vendredi 22 juin, le collectif manifestera son rejet du projet lundi 25, à l’entrée du conseil municipal. Cette fronde laisse malgré tout l’équipe municipale de marbre. Pour Jean-Claude Gaudin, dont c’est le dernier mandat, ce recours aux marchés de partenariats constitue « la procédure la plus rapide et la plus efficace », d’autant que la ville est surendettée.
Le maire l’a redit jeudi 21 juin, il n’entend pas faire machine arrière malgré la polémique. Les premières réalisations de ce chantier pharaonique – ultime symbole de l’ère Gaudin – doivent être livrées en 2021.