La Cour des comptes tacle l’efficacité des partenariats public-privé
Les partenariats public-privé, souvent encensés par les politiques en Europe, présentent de nombreuses lacunes et des avantages limités, selon la Cour des comptes européenne.
« Les partenariats public-privé (PPP) cofinancés par l’UE ne peuvent être considérés comme une option économiquement viable pour la fourniture d’infrastructures publiques », a affirmé la Cour des comptes européenne dans un rapport.
Les auditeurs ont évalué 12 PPP cofinancés par l’UE entre 2000 et 2014, en France, en Grèce, en Irlande et en Espagne « dans les domaines du transport routier et des technologies de l’information et des communications (TIC) », dont le montant total s’élevait à 9,6 milliards d’euros. La contribution de l’Union à ces projets représente 2,2 milliards d’euros.
Au cours de cette même période, l’Union a octroyé « 5,6 milliards d’euros pour 84 projets en PPP », pour le coût total représentait 29,2 milliards d’euros.
La Grèce est de loin « le principal bénéficiaire des contributions de l’UE, avec 3,3 milliards d’euros ou 59 % du total », suivi par le Portugal, avec 564 millions, et la France, avec 324 millions. « Les fonds culturels et les fonds de cohésion sont la principale source de financement des PPP par l’UE », suivis par des instruments financiers, « souvent en coopération avec la Banque européenne d’investissement (BEI) ».
Pourtant, ces partenariats public-privés « affaiblissent la position de négociation des pouvoirs adjudicateurs », car peu d’entreprises ont le soutien financier nécessaire pour soumettre des offres, selon Oskar Herics, un membre de la Cour des comptes européenne responsable du rapport.
« Le manque de clarté des politiques et des stratégies », les cadres juridiques insuffisants et les scénarios « trop optimistes » concernant les demandes futures ont entraîné une augmentation des coûts dans la plupart des cas.
Des surcoûts assumés par le partenaire public
Les projets contrôlés « ont été confrontés à une forte augmentation des coûts, de près de 1,5 milliard d’euros. En Grèce, la hausse des coûts a été de 1,2 milliard et en Espagne de 0,3 milliard d’euros, tous deux supportés par des partenaires publics », estime Oskar Herics. Dans certains cas, comme un projet en France (Pau-Pyrénées) et en Irlande (MAN), il n’y a pas eu d’analyse globale des coûts.
Le membre de la Cour des comptes européenne responsable du rapport explique que ces pays ont été inspectés en raison leur nombre important de PPP cofinancés par l’UE. Il a également précisé que les auditeurs n’ont trouvé aucune différence significative entre les projets financés par des fonds structurels ou ceux financés par des instruments financiers.
Les auditeurs recommandent donc aux États membres de veiller à l’optimisation des ressources pour les PPP et à définir des politiques et stratégies claires en identifiant les secteurs les plus appropriés pour que ce modèle puisse fonctionner.
Ils conseillent également à la Commission d’améliorer le cadre de l’UE « afin d’augmenter l’efficacité des projets en PPP, de manière à ce que le choix de cette option soit justifié par des considérations en matière d’optimisation des ressources ».
Ce que dit la Commission
En réponse au rapport, la Commission européenne a rejeté l’absence de plainte en matière de concurrence, invoquant la procédure d’appel d’offres internationale ouverte aux marchés de l’UE et à l’Espace économique européen (EEE). Si elle a reconnu qu’il y avait des retards et un dépassement des coûts, elle les attribue aux « effets de la crise de la dette souveraine et de la récession qui a touché l’économie européenne ».
En ce qui concerne les trois autoroutes grecques, la Commission soutient la décision du pays d’opter pour des projets en PPP car « les fonds publics, nationaux et européens n’étaient pas suffisants pour achever la construction d’autoroutes transeuropéennes en Grèce dans un délai raisonnable ».
En ce qui concerne l’autoroute C-25 en Espagne, la Commission s’est référée à la BEI, reconnaissant des retards importants dus « à la crise économique mondiale ». Pour le projet TIC à Pau Pyrénées, elle estime que l’absence d’analyse coût-bénéfice est justifiée en raison de la nature innovante du projet et de l’absence d’expérience comparable en France.